Depuis 1992, le Centre d’études francoprovençales René Willien a aménagé 25 expositions au Musée Cerlogne. Ce parcours de visite a été imaginé à partir de matériaux issus des expositions du passé : en illustrant trois différentes manières de penser le patrimoine dans une perspective ethnologique, il évoque autant de processus de construction d’une identité collective localisée.
De belles images en noir et blanc
L’exposition Cheveux et coiffures d’antan se propose de décrire et de magnifier un domaine spécifique de l’entretien de la personne, celui de la chevelure féminine. La beauté des portraits épouse la beauté des supports choisis pour leur mise en scène. Les vieilles photos nous plongent dans le monde des filles d’antan, de leurs mères, de leurs grands-mères. Par le biais du noir et blanc, le public est ainsi convié au cœur d’un univers paysan désormais révolu, appartenant à un passé intemporel fait de pratiques sociales et de valeurs esthétiques qui contrastent avec notre présent.
Des personnages illustres
L’abbé Cerlogne (1826 – 1910) est le père de la littérature valdôtaine en francoprovençal, auteur d’une œuvre foisonnante et pionnière.
René Willien (1916 - 1978) est un promoteur éclectique et infatigable de la culture valdôtaine dans l’après-guerre.
Fin connaisseur de l’oeuvre de Cerlogne, René Willien désigne la communauté de Saint-Nicolas pour entretenir la mémoire du félibre valdôtain. Il crée le Musée Cerlogne. Il lance aussi un concours scolaire réservé aux élèves des écoles valdôtaines ayant pour but de promouvoir le francoprovençal et la culture valdôtaine : ce sera le concours Cerlogne. Enfin en 1967, toujours à Saint-Nicolas, il fonde le Centre d’études francoprovençales qui lui est intitulé depuis sa mort.
Ces deux personnages ont fait l’objet d’une narration et d’une célébration au sein de la communauté de Saint-Nicolas et dans les milieux culturels valdôtains. Par le biais de leur œuvre en faveur de la langue francoprovençale, ils ont été élevés au rang de référents patrimoniaux collectifs.
L'ethnologie à l'épreuve d'une patrimonialisation par le bas
En 2013, les alpagistes de la combe de Vertosan et la commune de Saint-Nicolas organisent une première fête de la desarpa, à l’occasion de la descente des alpages. L’originalité de l’événement réside dans le rôle joué directement par les éleveurs dans la conception de la fête.
Le Centre d’études francoprovençales saisit cette occasion pour faire de la communauté de Saint-Nicolas un observatoire privilégié, en analysant les pratiques et les représentations contemporaines.
Cette démarche de recherche participative permet d’interroger la manière dont le passé est (re)présenté dans le présent en saisissant les mécanismes par lesquels les éleveurs s’approprient la tradition pour définir leur identité aussi bien que leur place au sein de la communauté locale : il s’agit d’un exemple de patrimonialisation par le bas, prenant son essor du regard que les acteurs eux-mêmes portent sur leurs propres pratiques.